top of page
HISTORIQUE

Le foot autoarbitré à 7 est aujourd’hui une des disciplines les plus importantes et les plus emblématiques de la FSGT. Son succès illustre aussi à sa manière comment le sport populaire a su s'appriorpier le ballon rond et le faire sien. D’une idée qui germa voici 50 ans à Aubenas, en Ardèche, et à Aubervilliers (Seine-Saint-Denis) jusqu’aux actuels terrains des cités de Grenoble, de Brest ou de Marseille, le foot autoarbitré à 7 est devenu, malgré les obstacles et les difficultés, le bien commun de plusieurs dizaine de milliers de joueurs réaffirmant chaque semaine un des slogans de Mai 68 : «le foot aux footballeurs !» # Par Nicolas Kssis

Pour être incollable

sur le sujet

Contrairement à une idée reçue, le foot, ne s'est pas toujours joué à 11. Dans la rue, les cours de récrée ou encore le soir après le travail, les formats n’ont jamais cessé de varier depuis qu’en 1863 quelques Colleges britanniques décidèrent de donner un nom et un contour élémentaire aux jeux de balles de leurs élèves, en proscrivant simplement d’utiliser les mains. Près d’un siècle plus tard, une nouvelle révolution va se produire au sein de la FSGT, qui donnera naissance au foot autorarbitré à 7.

Tout a commencé avec le soucis d’expérimentation qui s’est fait jour dans deux départements, et même plus précisément dans deux villes : Aubervilliers, en Seine-Saint-Denis, et Aubenas, en Ardèche. Les étincelles qui enflammèrent la plaine.

Du côté de la Seine-Saint-Denis, l’affaire remonte à Mai 68 qui ne fut pas qu’une révolte étudiante dans le quartier latin. Dans toute la France, les usines sont occupées, et les ouvriers cherchent à se distraire. Le secrétaire général du Club municipal d’Aubervilliers (CMA), Jo Dauchy, lance l’idée d’un challenge de foot entre des équipes constituées par les grévistes. Les matchs ont lieu dans la journée, au stade municipal.

Les «accords» de Grenelle (du nom de la rue du ministère du Travail), se traduisant essentiellement par une augmentation générale des salaires (+10%) et notamment des plus bas (+35% pour le Smig), voient, fin mai, s'arrêter, sinon s’essouffler, les occupations. Une fois le travail repris, l’idée s’impose chez les dirigeants du CMA de poursuivre l’expérience, qui se traduira par un critérium de foot en juin 1969, avec la participation des entreprises et des maisons de jeunes d’Aubervilliers. Devant l’affluence (de nouvelles équipes s’agrègent, celle des enseignants, celle d’une entreprise de peinture, l’équipe des bouchers…), il est décidé de couper le terrain en deux dans le sens de la largeur et de simplifier les règles, de réduire les teams à 7, et d’instaurer l’autoarbitrage, «il fallait faire jouer tout le monde» (dans un premier temps, la responsabilité de l'arbitrage est confiée aux capitaines de chaque équipe appelés à se consulter en cas de litige).

Le format séduit immédiatement car il permet d’accueillir les débutants tout mettant le plaisir au centre de l’activité. Pendant des années, les travailleurs vont se retrouver le lundi soir, autour de ces principes fondateurs : l’esprit de convivialité et l’ouverture à tous les niveaux de pratique.

​

Au même moment, du côté d’Aubenas, en Ardèche, on se met aussi à jouer au foot à 7, lors de la saison sportive 1969-1970. Là aussi les choses se font jour de façon fortuite. C’est, en effet, à la suite de plusieurs échecs dans le lancement d’un challenge interentreprises de foot à 11 que Marcel Chabrol, ancien résistant et militant communiste respecté, décide de créer des rencontres à 7. L’idée, soumise à des anciens footballeurs de la Fédération Française de Football (FFF), prend corps avec le soutien de Norbert Atsgen, jeune syndicaliste récemment arrivé de Belgique. Un championnat se met en place, hors fédération, autour d’une association et dans le salon de coiffure où Marcel officie en même temps qu’il règle tous les problèmes sportifs. Et parmi ceux-ci, des joueurs peu disposés à jouer le rôle de l’homme en noir. Ainsi, devant le manque d’arbitre, l’autoarbitrage fut en définitive rapidement établi pour tous, «ce fut là l'innovation la plus importante au plan pédagogique et éducatif», témoignera Marcel. Aubenas est à mille lieux de la banlieue industrialisée parisienne, pourtant les deux expériences se rejoignent sur plus d’un point : signe que la formule était dans l’air du temps et répondait au besoin de vivre un autre football.

Après la Sarthe, en 2016, c'était au tour du comité de Seine-Saint-Denis, d'accueillir le National de football autoarbitré à 7 FSGT, les 16 et 17 juin 2017 avec 12 équipes venues de l'Orne, du Val-d'Oise, des Bouches-du-Rhône, de l'Essonne, de l'Indre-et-Loire, de Haute-Garonne, du Rhône, du Val-de-Marne et du 93.

Des équipes d’usine à celles de quartier

 

Toutefois, cet élan initial demandera de nouveau à être repensé et à être reformuler devant l’évolution de la société française. Ainsi, pendant les années 1970, le foot à 7 qui se perpétue à Aubervilliers le lundi soir, affronte la résistance des tenants du «11» classique qui contient son développement. De même, la désindustrialisation de la proche banlieue parisienne transforme son public potentiel. Il ne reste à un moment que 5 ou 6 équipes. Il y a péril en la demeure. C’est l’ouverture aux clubs de quartier qui va relancer la machine. Ce sont parfois d’ailleurs souvent les mêmes personnes qui reprennent le flambeau, après avoir pratiqué au sein de leur entreprise. Désormais, ils reforment des équipes en dehors du travail. Le lien qui unit les joueurs est dorénavant l’appartenance au quartier, à la cité ou bien à un lieu de rencontre comme un bistrot.

C’est un tournant dans le développement du foot à 7 en Seine-Saint-Denis. Par le bouche-à-oreille, des équipes se fondent à Drancy, à Bobigny, à La Courneuve… et intègrent le championnat du CMA. Le problème de la disponibilité des installations et de la reconnaissance du foot à 7 se pose avec encore plus d’acuité. Le comité 93 obtient des terrains à Bobigny, à Drancy, à Bagnolet et le nombre d’engagés continue d’augmenter jusqu’aux 80 équipes actuelles. Les conditions sont donc réunies pour passer d’une gestion locale à une gestion départementale. Après 1988, le comité 93 reprend à son compte l’intégralité des épreuves.

En Ardèche, sur la même période, le championnat de foot à 7 connaît une évolution sensiblement plus rapide que son homologue du 93, non sans rencontrer également des difficultés après les premières saisons. Outre la solution «miracle» de l'autoarbitrage devant le peu d'engouement des joueurs pour endosser le costume de l’arbitre, le lancement d'un championnat en semaine, face aux difficultés d'accès aux stades le week-end (avant tout réservés aux clubs de foot à 11), se révèle également un succès. Enfin, pour continuer à disposer de terrains, ce championnat encore «hors fédération» va devoir se rapprocher de la FSGT. À cette époque, la loi dite Mazeaud prévoit que les installations sportives seraient seulement ouvertes aux associations affiliées fédéralement.

Marcel Chabrol connaissait la Fédération pour y avoir été licencié dans le Gard ; suivant son souhait, toutes les équipes y adhéreront en 1977. Le processus d’intégration est une réussite, tant finalement les valeurs et les ambitions s’avèrent similaires. Il va même plus loin en aboutissant à la constitution d’un comité départemental, à la participation au congrès national et à la Commission sportive fédérale (CSF) de football.

​

Du 13 au 15 octobre 2017, le comité FSGT 13 accueillait des équipes venues du Portugal, d'Italie, de Slovénie et de Palestine, mêlées à des clubs des Bouches-du-Rhône, des Alpes-Maritimes, de Hautes-Garonne, de Paris, de Seine- Saint-Denis et du Val-de-Marne, pour la première édition de l'Euromed BPA7 (Balle au pied autoarbitré). n

Un foot simple et sans pression

 

On peut dire que les championnats de foot à 7, après avoir emprunté des chemins différents, se retrouvent, au tournant des années 1980, dans une même phase d’institutionnalisation. Un rapide examen des licences de Seine-Saint-Denis montre que la plupart des joueurs de foot à 7 sont nés après 1970. Ils se révèlent donc plutôt jeunes et bien peu ont pu connaître les premières années du foot à 7. Les configurations sociales des équipes ont évolué elles aussi. Elles sont davantage ancrées sur des sociabilités locale, amicales, de «cité» ou de communautés d’origine. Pourtant, l’esprit du foot à 7 demeure. Il se trouve même conforté par la croissance du nombre de joueurs qui recherchent un football plus simple et sans pression, avec une grande souplesse dans la définition des règles et des formules de compétitions. De plus, le choix des matchs en semaine, au départ contraint, s’est révélé un immense avantage, garantissant une pratique régulière libérant le week-end, tout comme cela permettait de fusionner match et entraînement en un seul moment.

Le foot autoarbitré à 7 va se diffuser désormais rapidement dans d'autres départements. En 1988, la première Coupe nationale est organisée. Avec plus de 26 000 pratiquants en 2018 (dans 29 comités), contre environ 10 000 à la fin des années 1990 et 2 500 à la fin des années 1980. Le nombre de pratiquants du foot autoarbitré à 7 à la FSGT s’est donc enraciné et continue de croître.

Au-delà des effectifs, ce sont concrètement de très nombreux matchs qui rythment la vie sportive des comités départementaux FSGT. Ils s'y sont investis en organisant de multiples championnats où «l’esprit du 7» vit et se transmet, où s’affichent clairement des valeurs et des choix fondamentaux : s’amuser, donner la priorité aux matchs et non à des entraînements physiques, faire jouer tout le monde et ne pas faire de sélection. Mais aussi, ne pas penser en premier au résultat du match, résoudre les questions d’autoarbitrage sans faire monter la pression, sans violence et s’impliquer. Autrement dit, aider à l’organisation de la pratique de tous par la recherche de terrains, par la gestion des résultats et des litiges, par l’organisation des poules, etc.

Enfin, fidèle à la culture internationaliste de la FSGT, le foot autoarbitré à 7 a fini par s’exporter dans le cadre des relations internationales de coopérations tissées avec certains pays, avec des rencontres organisées en Algérie ou en Palestine, mais surtout au Japon où il existe maintenant un championnat régulier... jusqu'à être introduit dans le programme des Jeux sportifs mondiaux de la CSIT (Confédération sportive internationale travailliste et amateur) en 2017, en foot à 5, sur proposition de la FSGT. Longue vie au FA7 !

En septembre 2009, pour la première fois une délégation de 10 joueurs des Bouches-du-Rhône et de Seine-Saint- Denis se rendait au Japon pour promouvoir le FA7 auprès de la Nouvelle fédération japonaise du sport pour tous, la Shintarein... et un logo créé pour l'occasion.

Dans le 7 : "Sport solidarité".

bottom of page